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La suppression des frais d’itinérance en 2017 a entraîné une forte hausse de l’usage des téléphones portables à l’étranger et a été saluée comme un immense succès. Mais cet épisode marquant n’est que l’aboutissement de décennies de coopération numérique au sein de l’UE, et le début d’une nouvelle phase visant à adapter l’Europe à l’ère numérique.
Aux origines du marché numérique européen
Étant donné la croissance rapide des communications numériques dans les années 1970, il était devenu évident, à la fin de cette décennie, que ce secteur serait fondamental pour le succès économique de l’Europe et aurait des effets considérables sur l’ensemble de la société.
En 1984, un programme de la Communauté économique européenne (CEE) soutient financièrement l’expansion des infrastructures ainsi que la standardisation des réseaux RNIS et le marché des équipements terminaux. Les années suivantes, des mesures de libéralisation supplémentaires permettent aux consommateurs, par exemple, d’acheter des téléphones, des fax et des modems à des sociétés autres que leur fournisseur d’accès : un processus inimaginable auparavant.
Dans les années 1980, le marché international se transforme en profondeur : dans le monde entier, des gouvernements brisent des monopoles et privatisent des sociétés appartenant à l’État. La première privatisation majeure en Europe fut la vente de British Telecom en 1984. La direction prise par le marché est claire : la CEE a compris la nécessité de réglementer la libéralisation du marché à l’échelle européenne et, en 1987, publie un document politique crucial qui ouvre la voie à la vague de privatisations des années 1990. En 1998, les règles de concurrence de l’UE s’appliquent pleinement aux opérateurs de télécommunications et presque tous les pays d’Europe ont privatisé leurs marchés, juste à temps pour la révolution suivante des communications numériques.
Du commerce électronique au marché unique numérique
L’an 2000 a marqué le début d’une croissance rapide de l’usage des réseaux à large bande et des téléphones portables. La Commission européenne initie en 2002 un paquet de mesures fondamentales qui ont contribué à harmoniser de nombreux aspects du marché numérique européen et des règles de concurrence et ont suscité d’importants investissements financiers dans les infrastructures numériques.
À mesure que la consommation de biens et de services augmente en ligne, la réglementation du commerce électronique prend de plus en plus d’importance. Internet apporte un grand confort aux consommateurs mais présente aussi certains risques. La directive de la Commission sur le commerce électronique de l’an 2000 réglementera entre autres la responsabilité, les contrats électroniques et le principe dit du « pays d’origine », qui clarifie quel droit s’applique à la publicité et à la vente de biens et de services dans les autres pays.
L’unité numérique de l’Europe a été davantage priorisée dans les années 2010, avec la perspective du marché unique numérique. Des sujets tels que la neutralité du réseau, c’est-à-dire le principe selon lequel les fournisseurs d’accès doivent garantir un accès égal à tous les services et contenus d’Internet, sont passés au premier plan dans la « stratégie numérique pour l’Europe » de la Commission en 2010.
L’une des initiatives les plus populaires et largement médiatisées sera la suppression des frais d’itinérance. En 2007, sous la présidence allemande du Conseil de l’UE, un premier règlement de plafonnement des prix à l’échelle européenne est adopté. Par la suite, les prix des appels, des SMS et des données en itinérance ont été progressivement abaissés. En 2016, le Parlement européen adopte l’abolition de tous les frais d’itinérance, une mesure entrée en vigueur en 2017.
En 2015, la Commission lance une stratégie globale ambitieuse pour le marché unique numérique, avec une large palette d’améliorations dans la vie numérique des consommateurs. Grâce à la réglementation sur le blocage géographique, les commerçants en ligne ne peuvent plus proposer différentes offres aux clients des différents pays de l’UE. Une autre nouvelle disposition permet aux citoyennes et citoyens européens de continuer à utiliser les services de streaming et les abonnements en ligne de leur pays d’origine lorsqu’ils voyagent dans un autre pays de l’UE. Les consommateurs bénéficient de davantage d’équité et de transparence lorsqu’ils réservent sur des portails en ligne comme les agences de voyage et les sites d’hébergement touristique, tandis que la protection numérique de leurs données a été améliorée.
L’avenir : intelligence artificielle, économie des données et services numériques
Alors que le monde numérique continue à changer à toute vitesse, il est vital que les Européens continuent à coopérer pour façonner un avenir numérique qui leur correspond. Du « big data » à l’intelligence artificielle en passant par les questions de protection des données et de droits numériques, les défis sont multiples. Comment pouvons-nous garantir que l’Europe reste innovante et compétitive et quelles sont les bonnes mesures d’incitation pour assurer un écosystème européen fort ? Voilà le type de questions qui se trouvent au programme de la présidence allemande du Conseil de l’UE. L’objectif est de développer une approche européenne de l’AI dans laquelle l’innovation et la confiance dans un marché unique sans frontières pour l’AI sont les deux faces d’une même médaille.
L’Allemagne préconise une démarche européenne commune pour exploiter le potentiel des nouvelles technologies numériques tout en atténuant leurs risques. La chancelière Angela Merkel a souligné la nécessité pour l’Europe d’être « numériquement souveraine », c’est-à-dire autonome en ce qui concerne les infrastructures numériques clés. Des clouds de données fiables qui stockent et traitent les données en Europe contribueront de manière significative à la sécurité des données européennes. En collaboration avec des entreprises et des associations de nombreux pays européens, le ministère fédéral de l’Économie et de l’Énergie mène d’ores et déjà le développement d’une infrastructure de données souveraine. GAIA-X sera une infrastructure de données fédérée et ouverte visant à soutenir une collaboration intersectorielle innovante et à promouvoir des modèles commerciaux équitables et transparents ainsi que les droits des individus à la confidentialité des données. Cette infrastructure ouvrira la concurrence sur le marché, améliorera la liberté de choix des utilisateurs et contribuera également à empêcher qu’un petit nombre d’entreprises privées monopolise le vaste marché des données.
Le 15 octobre 2020, les ministres européens chargés des télécommunications et du numérique se sont réunis pour débattre d’une série de sujets liés à la numérisation. À l’ordre du jour : l’économie des données, l’intelligence artificielle et les services numériques. Les discussions sur les services numériques visaient à créer un cadre juridique européen moderne pour les services numériques. Les ministres ont estimé que le cadre juridique devrait être adapté aux nouveaux développements numériques et au paysage concurrentiel. Les grandes plateformes sont capables de contrôler des écosystèmes de plateformes de plus en plus importantes dans l’économie numérique. Pour les fournisseurs de petite et moyenne taille, il est donc important qu’une concurrence loyale règne dans l’écosystème des plateformes en ligne. Les ministres ont également discuté sur la manière d’améliorer l’interopérabilité des normes de données et de soutenir les innovations dans le domaine des données en s’appuyant sur la « stratégie européenne pour les données » publiée par la Commission en février 2020. Cette stratégie propose un cadre juridique de réglementation des espaces européens communs de données. Ce cadre mettra en place des mesures favorisant un partage de données fiable entre tous les acteurs et améliorera les conditions d’utilisation des données. Ce cadre sera étroitement lié à la création d’une fédération européenne de cloud, au sujet de laquelle les ministres ont adopté une déclaration commune au cours de leur réunion. Dans cette déclaration, les États membres de l’UE s’engagent à favoriser les réseaux européens et à débloquer les synergies entre les initiatives existantes en matière de données et de cloud computing. Au cours de sa présidence du Conseil de l’Union européenne, l’Allemagne mettra tout en œuvre pour garantir que l’Europe continue sur la voie d’une communauté numérique moderne, sûre et innovante.